Le dilemne de la prise électrique – Education non violente, bienveillance.
Aujourd’hui j’aimerai parler d’éducation.
Nous sommes tous plus ou moins le fruit d’une éducation traditionnelle, composée de punitions, de récompenses, de bébés que l’on laisse pleurer, d’enfants qui doivent être sages comme une image, de petites tapes, fessées qui remettent dans le droit chemin. Rien de très violent. Enfin, du point de vue d’un adulte. Après tout nous n’en sommes pas morts. Une fessée de temps en temps, ça remet à la place. Une punition et on a compris la leçon.
Les études ont désormais prouvé l’effet négatif de ce que l’on appelle la violence ordinaire. Laisser pleurer un enfant, un bébé, punir, faire du chantage, taper… Ces pratiques ont des effets négatifs sur le cerveau des enfants. Ils perdent confiance en eux, en les autres, développent du cortisol, hormone du stress, qui s’emmagasine dans le cerveau et a des effets négatifs par la suite.
Des chercheurs de l’Ecole de médecine d’Harvard ont analysé les relations entre les pratiques de maternage, les capacités d’apprentissage et les réactions émotionnelles des bébés . La conclusion est claire, puisqu’il y est dit que « les parents doivent savoir qu’en laissant pleurer leur enfant sans lui accorder d’attention, ils peuvent provoquer chez lui des dommages à long terme. Le système nerveux de l’enfant deviendra anormalement sensible aux traumatismes à venir ».
Suite à la naissance du gnocchi, nous n’avons pas vraiment eu le choix et avons pratiqué le maternage. Car nous ne pouvions ni le poser, ni le coucher ailleurs que dans nos bras. Suite à ça, instinctivement nous avons adopté une éducation à l’écoute de ses besoins. Puis j’ai appris grâce à une amie que nous mettions en place tout doucement ce qui se nomme l’éducation bienveillante, éducation non violente (opposée à la violence éducative ordinaire décrite plus haut), ou parentalité positive.
En pratique, voilà ce que ça donne :
Lorsqu’il avait 9 mois, le gnocchi rampait allègrement depuis un moment. Et il adorait découvrir son environnement, les objets, les trous, les fils…
Le jour arriva où il découvrit cette chose terrible que redoute chaque parent : La prise électrique.
Avec ses petits trous à peine plus petits que ses doigts, sa vague forme de visage, son bitoniau en métal qui dépasse, le tout situé pile à hauteur des yeux d’un marathonien à 4 pattes.
Et il faut dire que les bébés ont le chic pour s’intéresser à tout ce qui ne leur est pas destiné.
Voyons Gnocchi, tu as un super chariot qui fait de la musique quand tu le touches, vibre si tu le pousses, lance des éclairs au plafond lorsque tu appuis sur les boutons et tu t’intéresse à ce pauvre bout de plastique terne et mal placé ???
Et oui, c’est la nature humaine. Enfin la nature bébéaine. Enfin vous avez compris quoi.
Bref, nous étions, Il Rigatoni et moi devant un dilemme. Une équation pourtant simple, dont on ne parvenait pas à trouver de solution satisfaisante.
1 -> Le premier réflexe, c’est d’éloigner l’enfant.
Sauf que si tu l’éloigne, tel un épagneul qui a débusqué un terrier, le gnocchi retourne sur le lieu dangereux dans les 5 secondes qui suivent. Bon. Il ne suffit pas d’éloigner, il faut l’empêcher de l’atteindre. Genre, déjà, qu’est-ce qu’un 9 mois fabrique à 4 pattes dans le couloir ?? Sa place c’est dans le parc !! Ouais, sauf que chez nous le parc, c’était 20 minutes par jour les bons jours, par tranches de 5 minutes sous peine de hurlement à la mort d’un gnocchi en mal de liberté. Et j’avoue, le parc, côté motricité libre, apprendre à appréhender son corps, son environnement, découvrir le monde, etc, ben c’est pas génial.
2 -> Lui apprendre qu’il ne faut pas le faire.
Ok. Bon. Comment tu apprends à un bébé de 9 mois à ne pas faire quelque chose ? Parce que genre si c’était possible, j’ai une liste de choses plus urgentes à lui apprendre comme ne pas me faire caca dessus lorsque je le change ou penser à dormir plus de 3h d’affilée la nuit.
3 -> En effet, il est jeune pour apprendre.. Mais on doit pouvoir l’éduquer…
Par exemple, avec une petite tape sur la main, à chaque fois qu’il touche la prise afin qu’il comprenne que c’est mal ?
Nous avons eu ce réflexe la toute première fois, et rapidement analysé notre geste et décidé d’arrêter..
Et lorsqu’il s’éloignera de la prise on lui donne un morceau de sucre ? Ca ne s’appelle pas de l’éducation mais du dressage.
Et comment dire à notre enfant, tu peux me faire confiance, si je le tape ? Comment peut-on le rassurer s’il a peur de nous ?
Et enfin, plus tard, comment lui dire de ne pas taper les autres, si nous le tapons lorsque ce qu’il fait ne nous convient pas ?
Bref, les limites de cette technique étaient trop nombreuses alors on a abandonné.
4 -> Le laisser explorer, tout en sécurisant.
A nous les cache-prise. Réorganiser le salon, l’étage, les pièces où il va souvent, afin qu’il puisse déambuler sans se blesser et sans rien casser. Le laisser explorer sans être après-lui toutes les 5 secondes parce qu’il risque d’abimer un objet auquel on tient.
5 -> Être patient.
Malgré tout, rien n’est sécurisé à 100% et quand on connaît les pouvoirs remarquables du gnocchi en terme de motricité, rien ne reste inaccessible bien longtemps (à 8 mois il se pendait à la porte du four et faisait une traction…)
Et répéter. Patiemment. Expliquer. Oui, tu la trouves belle la plante, et tu aimes tirer sur ses feuilles. Lorsque tu fais ça, la plante s’abime, et souffre. Je te propose donc de jouer avec les cubes à la place.
Et répéter. Parce qu’à 9 mois, question empathie botanique, le gnocchi, il est un peu juste.
Et répéter. Jusqu’à ce qu’il intègre qu’il ne doit plus faire cette action. Je préviens, ça peut être LONG.
6 -> Proposer une alternative, faire diversion.
L’une des stratégie les plus efficaces de notre mode d’éducation c’est la diversion. Afin que l’enfant lâche ce qui nous pose problème, ou arrête une crise, arrête de demander un objet qui lui est interdit pour une question de sécurité, nous lui proposons une alternative, une activité, un objet inconnu qui captera son attention et réglera le problème sans confrontation. (Ce qui marche super bien chez nous c’est le tiroir de la cuisine, on sort tout un tas d’objets bizarres qu’il n’a jamais vu et il va passer un moment à les découvrir (enfin 5 minutes quoi, juste le temps qu’il oublie la prise électrique)).
7 -> Accueillir ses émotions.
L’enfant, le bébé est une personne, vexée, frustrée, parce qu’il n’a pas pu faire ce qu’il voulait. Souvent, on oublie de se mettre à leur place.
Imaginez le tout dernier prototype de smarphone de la marque à la pomme devant vous sur une table, tout le monde y touche, vous montre ses nouvelles fonctionnalités, vous dit que si vous parlez dedans il vous fera le café en plus de vous lire l’horoscope et vous faire perdre 5kg tout en lisant des blogs culinaire.
Et au moment de tendre la main pour l’attraper, on vous dit :
– NON !
– Euh, pourquoi ? (language bébé : Ouinnnnn) et vous essayez de l’attraper à nouveau.
– J’ai dit NON !
– Mais j’ai très envie de le toucher moi aussi (Langage bébé : Ouiiiiiiiiinnnnnnnnnnnnnnnnnn)
Alors que si on vous dit :
– Tu ne peux le toucher car il est fragile/c’est une bombe il va exploser/tu n’es pas un membre VIP donc tu n’as pas le droit
Pour le bébé, on dit :
– Il faut le laisser car il est fragile/dangereux, il risque de se casser/abîmer/te faire mal.
Vous serez frustré, vexé, mais vous comprendrez. Un bébé, lui, il n’a pas le cerveau assez mature pour comprendre. Mais ses émotions sont là quand même.
Alors il est important de les accueillir.
– Je comprends que tu sois triste, tu as très envie de jouer avec cette prise et on t’en empêche. Tu as le droit d’être en colère. Si tu veux je te fais un câlin et ensuite on va jouer avec tes cubes.
L’enfant est entendu. Et souvent, vous verrez qu’il arrêtera sa crise, car il a été entendu, compris. On a accepté qu’il puisse être frustré, et on lui a laissé l’espace pour l’exprimer. Ainsi, il peut passer outre sa colère. Chez nous c’est assez magique. Une crise se calme en quelques secondes avec quelques mots d’empathie.
Cet exemple s’applique pour un bébé mais s’adapte tout aussi bien à un enfant plus grand, qui, si on lui explique les choses comprendra encore mieux.
L’éducation non violente, la parentalité positive, ce n’est pas facile.
Mais c’est vraiment un moteur de se dire que cela porte ses fruits sur le long terme, qu’un enfant qui a confiance en ses parents a aussi confiance en lui. Cela demande de la remise en question. Il faut se libérer des automatismes acquis de notre propre expérience. Se dire que l’on est faillible, que personne n’est parfait et que l’on peut perdre patience parfois. Oser changer de cap lorsque celui que l’on a pris n’est pas idéal. Il faut beaucoup de courage. Se dire aussi que les erreurs du passé peuvent être réparées. Il n’est jamais trop tard pour s’excuser, réparer, et devenir bienveillant.
Ici je ne suis pas là pour juger votre mode d’éducation, juste donner des pistes, de l’information, amorcer quelque chose, pour ceux qui en ont envie !
Si vous voulez en savoir plus :
Isabelle Filliozat, psycothérapeuthe, auteure de livres sur l’éducation non violence
J’ai tout essayé
Peps Magazine – Le magazine de la parentalité positive
L’observatoire de la violence éducative ordinaire
Merci pour ce bel article!
Merci pour ton commentaire et bienvenue 🙂
Je trouve ton article très intéressant ! On fait déjà ça avec le grand de 7ans.. Moi je le fais avec ma puce de 4 mois et j ai vraiment la sensation que ça fonctionne.. Je lui explique tout depuis le début.. Seule la pédiatre semble me comprendre.. Lol.. Les gens ds les magasins qd ils me voient parler à ma puce ils doivent penser que je suis zinzin.. Ils sourient.. Moi je sais qu Elle me Comprend !!!
Au plaisir de te lire..
Xxx
Oui je suis sûre aussi que ta fille te comprend ! Les gens ont un peu tendance à penser que les bébés sont des objets… C’est eux les zinzins 🙂
Dans le meme etat d’esprit en même plus explicite , je vous propose la lecture de « Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent » de faber & mazlish , livre passionnant .
On est en plein dedans pour les prises électriques… Comme tu le dis, c’est LONG. Et ça le fait rigoler 🙂 Mais bon, je me mets à sa place, je ferais pareil. J’ai débranché tout ce que je pouvais pour remplacer par des caches prises, plutôt que d’avoir les gros transformateurs noirs qui attirent l’oeil. A suivre…
Je me demande quand même un truc, avec les caches prises, tu le laisses toucher du coup ? Ou tu dis quand même non, en expliquant qu’il peut se faire mal. Et du coup, les caches prises sont plutôt là pour nous rassurer nous ? Pour le moment, c’est ce que je fais, je me dis qu’il faut quand même rester cohérent et ferme sur les prises, qu’elles soient cachées ou non. La diversion, ça marche vraiment pas à tous les coups !
Je me dis aussi, que ça va passer ! 🙂
Merci pour cet article bien documenté, c’est rassurant de voir qu’on en passe tous par là 🙂
Merci pour ton message 🙂
Si je me souviens bien, nous l’avons laissé expérimenter quelques fois avec la prise protégée par le cache-prise (sous surveillance), et très rapidement il s’en est lassé. D’une part, l’objet en lui même n’a rien de très intéressant, et d’autre part il n’y avait plus d’enjeux autour (sécurité / attention des parents) et devant notre indifférence, il est devenu indifférent aussi 😉
D’accord ! Effectivement, il faut faire attention à ne pas rendre l’objet plus intéressant qu’il ne l’est !
Je vais voir comment ça évolue et tenter ça 🙂
Je commence à m’intéresser à l’éducation bienveillante telle qu’on en parle dans les livres, les blogs etc…
Je trouve ton explication très simple et cohérente, et tu me permets de mettre des mots sur des impressions que j’avais déjà.
Je m’aperçois en fait que je le faisais déjà un peu sans m’en rendre compte, alors je suis toute contente (lol).
J’ai une amie qui m’a expliqué aussi que plutôt que de dire « ne touche pas à ça » il vaut mieux dire « c’est interdit » (tout en expliquant pourquoi bien sûr). Parce que dans la première phrase il va surtout entendre le mot « touche » et va donc vouloir toucher. Qu’en penses-tu?
Il doivent se dire des fois : « maman m’avait dit un truc à propos de ce machin, je ne sais plus quoi, mais ça devait être important comme objet, alors j’y retourne! »
Pour le moment j’ai décidé de mettre les protections pour les prises et le laisser regarder : il se désintéresse plus vite que quand je l’empêchais d’y toucher.