De la mère au foyer à la féministe maternante
Je travaille en indépendante depuis 2007.
Depuis la naissance du gnocchi, j’ai dû alléger mes journées, et je les ai réduites à des demi-journées de travail.
Ce rythme de travail ne me permet pas de travailler suffisamment pour gagner correctement ma vie et est à peine rentable.
J’ai donc décidé d’arrêter pour un job moins stressant et moins prenant à temps partiel. Il y a quelques mois j’ai lancé quelques candidatures spontanées à droite à gauche.
Et pourtant, aujourd’hui, j’ai refusé un emploi.
Un super job, bien payé, en CDI. Avec des responsabilités, des missions intéressantes, un peu de management, dans un domaine sympa, à 5 minutes de chez moi.
Le job qui convenait à mon niveau de compétence.
Le job parfait pour une reprise de travail en entreprise.
Mais ils me demandaient de travailler à plein temps.
Alors j’ai refusé.
Ça peut paraître fou. Surtout dans le contexte actuel. Je sais que beaucoup n’approuveraient pas.
De nombreuses personnes en recherche d’emploi se demandent comment je peux refuser pareille offre.
Pourtant non, nous ne roulons pas sur l’or.
Je ne touche aucune aide de l’état, étant indépendante.
J’ai pris un congé parental de 6 mois à 80% (car étant indépendante je n’avais pas le droit au 100%) terminé depuis 1 an.
Et pourtant je ne regrette pas.
Les fins de mois peuvent être difficiles. On rogne sur les loisirs. On fait attention lorsque l’on fait les courses.
J’ai toujours aimé mon métier. Je me suis toujours définie par rapport à mes compétences. Puis ce gnocchi a débarqué et m’a transformée en maman.
Et je n’ai jamais été aussi heureuse.
Et ce job, même idéal, ne sera jamais aussi important que mon instinct qui me dit que ma place est près de lui.
Je ne serai donc pas une femme qui travaille mais une mère au foyer.
Cela parait bien loin du rêve féministe que j’avais en tête adolescente : Autonomie, indépendance, carrière, moyens financiers.
Et pourtant je pense ne jamais avoir été aussi féministe.
Car c’est mon choix.
Élever mon fils plutôt que le confier 10 à 12h par jour à une structure au milieu de dizaine d’autres enfants.
Lui apporter du temps. Du réconfort. De la présence lorsqu’il en a besoin.
Recharger ses batteries.
Avoir le temps de faire des recherches sur ses problèmes de santé, chercher des solutions, programmer des rendez-vous, être présente.
Avoir le choix de le porter, l’accompagner, l’écouter.
Avoir le choix d’écouter mes instincts au lieu de les enfouir.
Avoir le temps, le choix, l’occasion de me questionner sur nos modes de consommation, l’éducation, l’alimentation, notre société.
Avoir le choix de pratiquer le maternage proximal.
Avoir le choix et ne rien subir.
Et être là.
Pour moi, être là pour mon fils n’est pas de l’esclavage. C’est une force. C’est un choix. Un choix anticonformiste dans une société conventionnée.
Assumer d’allaiter un enfant de bientôt deux ans jusqu’à son sevrage naturel.
Assumer d’allaiter en public pour que les mentalités changent.
Assumer le fait d’être un mammifère faite d’instincts et les écouter au maximum.
Assumer mes choix d’éducation. Répéter et convaincre les autres qu’un bébé n’est pas objet. Qu’un enfant est une personne que l’on doit respecter.
Poser les bases d’une éducation respectueuse de cet enfant.
Me confronter à une partie du corps médical qui considère que le corps ne se soigne qu’à travers les médicaments.
M’informer sur l’alimentation et les dégâts qu’elle peut avoir sur la santé lorsqu’elle est mauvaise.
Ce maternage proximal est une prise de pouvoir sur mon propre corps. Sur ma vie. Un choix éclairé, conscient et responsable. Pour mon bonheur et celui de ma famille. Pour le présent et pour le futur. Pour ce que nous serons et ce que nous donnerons à nos enfants demain.
Ce maternage proximal est un engagement féministe, écologiste.
Humaniste.
Alors oui, je suis mère au foyer. Et fière de l’être.
Pour aller plus loin : Maternage et féminisme, ça va très bien ensemble ! Grandir Autrement (Novembre-décembre 2012)
Eh bien moi je dis bravo ! Et je t’admire. Il faut assumer jusqu’au bout. Et cela me fait penser à ma fille de bientôt 9 ans qui en ce moment, veut « têter » (et pousse les hauts cris quand on parle de sexe, mais le montre sans complexe en jouant sur son lit sans culotte) bref. Bravo, et merci !
Moi ça me fait du bien aussi d’aller bosser (mère indigne qui met ses enfants au centre de loisirs…)
Merci pour ton commentaire 🙂 oh je ne pense pas que tu sois une mère indigne car tu mets tes enfants au centre de loisirs ! Ou alors on est toutes indignes à un moment ou à un autre (-;
Ouais, je ne pense pas que ce soit moins digne de travailler que d’élever son enfant, et inversement ! Ce qui est important, et Mamadonne l’a bien mis en avant, je trouve, c’est cette notion de choix. Pour moi, un bon féminisme (et « humanisme », même si ce n’est pas le mot qui convient, peut être), c’est celui qui permet et accepte que chacune/chacun puisse faire le choix qui lui correspond à un moment donné. Je suis aussi Till The Cat, qui lui a choisi avec sa compagne que lui serait père au foyer. C’est leur choix, ils n’en sont pas moins une famille équilibrée.
Me questionnant aussi sur ce choix – j’envisage de me mettre à mon compte tout en « oeuvrant » pour avoir un titou – mais d’un autre côté, je me pose aussi la question de savoir si je veux confier mon gamin à une structure d’accueil en permanence… Non qu’elles soient incompétentes… Mais vu le bordel pour pouvoir être mère, je ne sais pas si j’aurai envie de m’éloigner de sa croissance ensuite…
Apres, j’ai eu le modèle de ma mère qui a organisé sa vie professionnelle autours de nos différents âges – congé parental en petite enfance, mi-temps de nuit en primaire, travail en horaire de bureaux au collège, temps complet de personnel soignant au lycée – ce qui fait qu’elle a toujours été présente comme il fallait pour nous. Donc forcément, ca guide dans ce sens…
Bravo pour cet écrit…
Cela fait du bien de lire ça, je suis un peu en plein doutes en ce moment. Moi aussi j’ai décidé de laisser mon cdi d’éducatrice pour m’occuper de mon petit qui a maintenant 10 mois. C’est pas simple d’être dépendante financièrement, d’avoir le regard de la famille sur le fait de pas bosser mais moi aussi je me dis que c’est ce qu’il y a de mieux pour mon fils. Parfois cela me manque de pas voir plus de monde, de me sentir utile auprès des familles que j’aidais à mon boulot mais bon, la mienne passe avant.
Y’a des jours de questionnements, aujourd’hui c’était le cas mais de vous lire me confirme que je fais le bon choix 🙂
Merci et bonne continuation!
Je partage ce point de vue, je le vis et je le désire plus que tout !!! J’essaie que ma famille évolue encore plus vers un choix de vie décalée mais raisonnée …. ce n’est pas facile de convaincre mon conjoint mais je vais y arriver 😉
Je crois que si on s’écoute, on sent ce qui est le mieux pour soi !
Je suis dans la même situation mais avec une petite madame de 3 ans. Comme toi, je dis souvent à mes copines que je n’ai jamais été aussi féministe! Vive la liberté de choisir (quand c’est possible).